Mieux vaut tard que jamais. Arber Qerimi a pris son temps, à l’heure de traverser le Quiévrain. Le capitaine de l’équipe de Belgique a en effet patienté jusque ses 26 ans avant de sauter le pas et de suivre les traces de Bram Dewitt, Jeff Lettens ou Thomas Cauwenberghs. Jusque-là, le passage au professionnalisme était un rêve enfoui dans sa tête. "Je pense qu’il ne voulait pas non plus être pro à tout prix, estime son compatriote, Thomas Cauwenberghs. Il attendait un projet qui lui correspondait vraiment." Un version confirmée par le principal intéressé. "L’occasion ne s’est jamais vraiment présentée, estime le talentueux demi-centre. Et puis je voulais privilégier les études pour avoir un diplôme et une sécurité."
Diplôme de comptable en poche, il était temps de se pencher sur le rêve d’enfant, celui d’imiter son père, Bujar, ancien pivot pro en ex-Yougoslavie, désormais coach en Belgique, son pays d’adoption. MVP de la saison passée au plat pays, le demi-centre, passé par Beynes et Tongres se montre particulièrement brillant face à l’équipe de France, en match de qualification pour l’Euro 2018. C’est à ce moment-là qu’il décide de s’engager avec Cesson-Rennes, où l’attend Yérime Sylla, son sélectionneur. "Le travail payait enfin pour moi. Je n’ai pas hésité longtemps, souffle le tout jeune professionnel. Et puis je retrouvais un coach que je connaissais, qui n’allait pas être effrayé par mes mensurations ! (rires)"
"Jouer le PSG, c'était utopique pour moi !"
Du haut de son 1,80m et de ses 76 kilos, le petit bonhomme est en effet bien loin des standards actuels au poste de demi-centre. Mais cet admirateur d’Ivano Balic et de Jackson Richardson n’a jamais joué à un autre poste. "Il faut croire que je maniais mieux le ballon que les autres à l’époque. On a dû se dire qu’il y avait moyen que je fasse bien jouer l’équipe", sourit-il. Inutile donc d’attendre d’Arber Qerimi de peser sur les défenses par son physique. Le lutin belge fait plutôt dans l’insaisissable, prêt à exploiter la moindre brèche pour s’infiltrer ou délivrer un caviar. "Il est franchement imprévisible dans son jeu", appuie Cauwenberghs. Restait à savoir si ce style de jeu, ce physique atypique étaient compatibles avec la Lidl Starligue et ce handball moderne où la puissance prend une place de plus en plus imposante.
"On va dire que je suis pas mal pour le moment, analyse le principal intéressé, auteur de 39 buts depuis le début de saison. Mais je dois encore améliorer pas mal de domaines. Je dois être plus régulier, plus buteur." Loin de se reposer sur ses lauriers, Arber sait qu’il aura toujours une ombre au-dessus de lui pour le remettre à sa place. "J’envoie tous mes matches à mon papa, confirme-t-il. Personne n’est aussi dur que lui avec moi et j’ai besoin de ça. Il est toujours là pour pointer ce que je fais mal dans un match, même s'il est bon." Un état d’esprit indispensable pour durer, son principal objectif, maintenant qu’il a goûté au professionnalisme.
"Je préfère ça à ma vie de comptable je l'avoue, sourit-il. Mais je ne me suis pas fixé d’objectifs précis. Je ne suis pas là pour dire: « je veux faire ça, jouer ici ». Je vis au jour le jour et pour le moment, ce qui m’intéresse, c’est redresser la situation à Cesson. On n’est jamais loin mais on ne gagne pas, c’est très frustrant. On ne peut pas se dire personnellement que l’on fait un bon début de saison quand l’équipe est sans cette situation." Mercredi, c’est face au PSG qu’Arber Qerimi pourra mesurer le chemin parcouru. "A une époque, c’était utopique d’être là pour moi. Et j’ai regardé le match face à Veszprem, et il y a quand même de sacrés joueurs dans cette équipe, conclut-il dans un sourire. Mais maintenant, ça fait partie de ma vie, et je vous rassure, on s’y fait très vite."
Benoît Conta