Les premières fois de... Arthur Anquetil

LNH - Publié le 06 avril 2020 à 16h47
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Agé de 24 ans, Arthur Anquetil, l’ailier gauche de Chambéry, revisite avec nous son début de carrière, au travers des premières fois qui ont jalonné son parcours.

Mon premier entraînement de handball

« Je devais avoir 11 ans. Avant cela je faisais du foot et du tennis pour être avec les copains et un jour mon père m’a proposé d’essayer. Avant cela, je n’avais pas spécialement eu envie car j’étais sans doute un peu trop dans les gymnases. (sourire) Jusqu’à mes 5 ans je suivais mon père à tous les entraînements , j’allais voir les matches. Je n'en avais pas spécialement envie. Et puis c’était un peu loin, j’habitais un petit bled à 30 minutes de Montpellier et c’était un peu trop exigeant pour mes parents, pour ce qui n’aurait été que du loisir. Et puis j’ai essayé et j’ai vite accroché… »

La première fois que j'ai pensé à devenir pro

« A partir du moment où mon nom a commencé à tourner au niveau du pôle Espoirs. A partir de là, tu commences à te dire pourquoi pas ? Ça a commencé à être là, dans un coin de ma tête. Je n’ai pas trop hésité car j’étais quand même plutôt bien accompagné avec mon père (Frédéric) qui était un ancien joueur, qui entraînait le centre de formation de Montpellier… Ça ne le dérangeait pas de m’emmener, et ce même si c’était un effort de sa part car j’étais au collège à 30 minutes de Montpellier, et lui venait me chercher pour m’emmener à l’autre bout… Il croyait vraiment en moi et j’essaye de lui rendre comme je le peux. (sourire) »

En compagnie notamment de son ami, Samir Bellahcene. (DR)

Ma première idole

« J’ai toujours été fan d’Ivano Balic. J’aimais bien l’image qu’il renvoyait sur un terrain, je le trouvais différent des autres, il m’a toujours fasciné. Et puis il y a forcément mon père qui a fait de très belles choses à Montpellier et pour le handball français. Ca reste mes deux idoles. Bon, il y en a qui défend plus que l’autre. (rires) »

Ma première roucoulette

« C’est venu au fur et à mesure. Mais c’est clair que lorsque tu es gamin, tu vois des gestes à la télé et tu as envie des les reproduire. Pour ma part, je me souviens d’une action de Jan Sobol qui a maintenu en vie Montpellier, face à Tchekhov. C’était en quarts de finale de la Ligue des champions (en 2010, ndlr) et il a placé une roucoulette qui m'a marqué… Depuis ce jour-là, je me suis m’y à essayer d’en faire. (sourire) »

Ma première engueulade avec mon père

« Oh il y en a eu une longue série. (rires) Je pense que mon père est le meilleur entraîneur qui existe au niveau de la formation. Il veut tirer le meilleur de chaque joueur, et de moi encore plus peut-être. Et quand tu es jeune, en pleine crise d’adolescence, tu ne comprends pas forcément. Je vais prendre un exemple à la con, mais quand tes copains ont à faire 5 pompes, et que toi tu dois en faire 10, tu ne comprends pas et tu te frustres. Et pourtant, c’est ce qui m’a permis de progresser. Je n’ai jamais autant évolué que sur ces 3/4 années, même si c’était forcément bizarre, même à la maison. J’étais vraiment immature, et je pouvais garder en moi la réflexion de l’avant-veille, quand il m’avait dit de sauter plus haut et de ne pas faire ma roucoulette de blaireau. (sourire) On avait un lien spécial, c'était parfois tendu, mais ça va beaucoup mieux depuis. J’ai mûri, et je dois d’ailleurs dire que j’ai un rêve, c’est celui qu’il me réentraîne un jour… (sourire) Je rêve un peu de retrouver cette période où il réussissait à tirer des choses incroyables du plus profond de moi-même… »

Mon premier match avec les pros

« Il y a eu ce match du Trophée des champions, en Tunisie, en 2013, mais je ne le retiens pas vraiment. Celui que je retiens plus c’est un Final4 de la Coupe de la Ligue, à Chambéry, en 2014. C’était au Phare, et il y avait quelques blessés donc j’ai pu être dans le groupe. Les pros ont plutôt bien fait les choses et en finale (face à Saint-Raphaël, victoire 34-21, ndlr) dans les cinq dernières minutes, il y avait +10/+12, et on est rentrés avec Jean-Loup (Faustin). J’avais pu me faire plaisir et j’avais mis une roucoulette. Je reçois une relance d’Arnaud Siffert en bout de course et il me reste 1m pour prendre ma décision. Je me suis excentré et la roucoulette est venue instinctivement. C’est l’un des mes plus beaux souvenirs. (sourire) »

La première fois que j'ai pensé à quitter Montpellier

« C’est venu au fur et à mesure. Quand tu es jeune à Montpellier, tu ronges pas mal ton frein. Tu fais des kilomètres en avion, en bus, en train pour ne voir que très rarement la couleur du terrain. Au bout d’un an et demi, je me suis dit que ce n’était pas pour moi. On a réfléchi avec mon agent, Andrej Golic, et mon père, et j’avais deux options: soit jouer en Proligue durant 60 minutes pour me montrer, soit être numéro 2 dans un club de Lidl Starligue. Mais si le numéro 1 performe, je peux aussi rester sur le banc et on ne me voit pas. Quitte à descendre d’un niveau, je voulais jouer beaucoup. C’est ce qui est arrivé à Sélestat, et j’ai vraiment pris beaucoup de plaisir là-bas (il y sera élu meilleur ailier gauche de la saison, ndlr). »

Mon premier titre

« Il y en a eu avec Montpellier, mais je ne jouais pas vraiment. Je n’appelle pas ça un titre car je rentrais une minute ou deux pour faire souffler, je ne participais pas vraiment au truc. Du coup, celui que je considère vraiment comme un titre, c’est cette Coupe de France remportée la saison dernière avec Chambéry. Elle a vraiment beaucoup de valeur à mes yeux. Cette aventure, durant laquelle on élimine Nantes et Montpellier, elle reste phénoménale. Il y a ce plaisir de gagner quelque-chose alors que personne ne nous attendait là. On était une équipe « moyenne » mais avec tellement d’ambition… C’était vraiment magique. (sourire) »

Mon premier match à Bougnol avec un autre maillot

« La saison dernière, c’était à l’Arena, donc c’est cette année, avec Chambéry bien sûr (en J3, victoire du MHB 28-27, ndlr). C’était assez émouvant. Ca faisait un peu plus de deux ans que j’étais parti et c’était tout joli, tout beau. Ils ont mis des écrans partout. (sourire) Il y avait un peu de pression quand même car c’est un peu ma maison aussi. J’ai vécu là-bas durant toute ma jeunesse, et là je jouais face à quelques copains. Il fallait que je sois doublement concentré. Et là où je sais que je ne me suis pas planté en partant, c’est qu’à la fin du match, les gens m’ont dit « ta famille peut être fière de toi », etc. On s’est intéressé à moi, ce qui n’était plus trop le cas à la fin de ma carrière là-bas. C’était devenu plus difficile pour moi humainement, j’avais l’impression de ne plus exister par moi-même. (sourire) »

Crédit: Patricia Sport

La première fois que j'ai eu honte sur un terrain

« J’ai le souvenir d’un match lorsque j’étais à Sélestat. Mon père est venu exceptionnellement me voir, et j’étais sur une bonne dynamique avec de très bons matches. Et puis là, j’ai tout raté. C’était face à Nice et j’ai fait 1/7 (1/4 en fait, ndlr). Je tombais tout seul en courant, c’était une vrai catastrophe. (sourire) J’ai eu honte car je n’avais pas réussi à gérer mes émotions… J’ai un peu craqué. Mais ça sert toujours de leçon. C’était la pression du papa qui vient voir le fiston grandir ailleurs, et ça m’a donné un coup de chaud. (rires) Il fallait passer par là et maintenant quand il vient me voir, ça va mieux. (sourire) »

Ma première folie dans le handball

Crédit: Laurent Théophile

« Je n’en ai pas plus que cela. J’essaye de rester calme car quand j’étais gamin, j’en ai sous doute trop fait. (sourire) C’est ma plus grande transformation. Je faisais pas mal le couillon et le fou sur un terrain. Les gens pensent que je suis un peu foufou sur le terrain, mais ils ne me connaissaient pas à l’époque où 120% de mes tirs c’était des roucoulettes et des chabalas. (rires) Ca ne passait pas trop avec mes entraîneurs. Ca a été dur pour moi de changer car je ne vivais que par ça. Il a fallu que je comprenne que la vie d'un joueur professionnel, ce n’était pas que ça. Il faut un peu de folie, mais il faut savoir le doser. »

Mon premier match après le confinement

« Ce sera une délivrance ! (rires) C’est bien d’avoir un peu de repos, mais au bout de trois jours j’avais déjà les jambes qui frétillaient… Je n’ai qu’une hâte c’est de retrouver la balle pégeuse et les copains, et se rentrer dedans. Et puis donner du plaisir aux gens surtout. Car c’est aussi pour ça qu’on est là, c’est avant tout un show, un spectacle. C’est comme ça que je vois les choses en tout cas. J’ai vite envie de retrouver les terrains pour procurer des émotions aux gens, que ce soit dans les salles ou à la TV. »

Benoît Conta