Mon premier entraînement de handball
« Je devais avoir 11 ans. Avant cela, j’ai fait un peu de basket, mais jamais de foot, ma mère ne voulait pas. (sourire) Mon père était joueur semi-pro et ma mère en avait marre de faire le tour de la Catalogne pour le suivre. Elle n’aimait pas trop ce milieu et du coup elle m’a dit: « fais ce que tu veux, mais pas de foot ! ». C’est dommage, je suis très doué... Vous pouvez le vérifier auprès de Rock Feliho. (rires) Du coup, à 11 ans, ma soeur a changé d’école et je l’ai suivi. C’était une école où est passé Valero Rivera notamment et le samedi matin, on avait hand. Avec deux potes, on a commencé à apprendre à faire rebondir la balle et puis on est revenus tous les samedi pendant 2/3 mois avant d’essayer les matches. L’année d’après je me suis décidé à me lancer. »
La première fois que j'ai pensé à devenir pro
« Ca doit être autour de mes 15/16 ans. J’étais déjà au Barça, dans les catégories jeunes, et à l’époque Xavi Pascual, qui s’occupait du centre de formation, m’a demandé si j’étais intéressé de rentrer dans leur programme, qui ressemble un peu à votre sport-études. C’était un programme où il y avait Rodrigo (Corrales), Gonzalo (Perez de Vargas) ou Alvaro (Ruiz ) notamment. On s’entraînait tous les jours à 7h du matin. On a fait 2/3 ans comme ça. On était 7/8 et on faisait pas mal de gammes. Et faire des tirs sur Gonzalo et Rodrigo à 7h30, ce n’est pas facile tous les matins. (rires) Ensuite on allait ensemble à l’école, on s’entraînait parfois aussi avec l’équipe 1, puis avec l’équipe réserve. On peut dire qu’on était bien fatigués le soir. (sourire) »
Mon premier match avec les pros
« Je m’en souviens très bien, c’est vraiment un beau souvenir pour moi. C’est en 2011, et Albert Rocas a eu son fils, et je l’ai remplacé. Je m’entraînais déjà un peu avec eux et là je me suis retrouvé à jouer un match de Ligue des champions, à Zagreb. Un vrai match quoi. (rires) On a dû gagner 31-30, j’ai joué les dix premières minutes de la première période et j’ai fait 2/2. C’était pas mal. (sourire) Ca aurait pu être un match facilement gagné en championnat, et je me suis retrouvé devant 10 000 Croates à Zagreb. C’était un match qu’il fallait absolument gagner, et il y avait pas mal de pression. Et puis c’était la première fois que je mettais le maillot de la grande équipe du Barça, après 7 ans à fréquenter les équipes jeunes. Quand tu arrives en équipe 1 après être allé voir tous les matches des grands, te retrouver avec tes idoles… C’est un truc incroyable. (sourire) »
La première fois que j'ai pensé à quitter Barcelone
« C’est en 2014. J’ai eu une conversation avec Xavi Pascual, qui était passé coach de l’équipe pro. J’étais le troisième ailier droit dans la hiérarchie, même si sur la dernière saison, j’ai pu jouer une vingtaine de matches avec l’équipe première. J’étais content de cette situation, de m’entraîner avec les plus grands joueurs du monde comme Danijel Saric ou Nikola Karabatic. Mais Xavi m’a dit que je resterais à cette place de numéro 3, que je n’aurais pas les minutes de jeu que je souhaitais. Sauf blessure, je n’aurais pas pu aspirer à plus. Ce fut difficile à accepter après neuf ans au club, mais je voulais aussi jouer et continuer à progresser. Et ça passait pas un départ inévitable. Je suis parti à Cuenca, et je suis content d’avoir fait ce choix. »
La première fois que j'ai pensé à jouer en France
« Le jour où j’ai reçu l’offre de Nantes. (rires) Avant cela, ce n’était pas quelque-chose auquel j’avais pensé. Ca m’a pris un peu de temps avant de me décider, savoir si c’est vraiment ce que je voulais. Mais je me suis dit que si je voulais évoluer, tant personnellement que sportivement, il fallait partir. On connaît la situation du championnat espagnol au niveau des salaires, avec des équipes qui ne respectent pas toujours les contrats... J’ai aussi appelé Valero Rivera, qui m’a dit qu’ils aimaient bien les Espagnols ici. (rires) Et puis j’intégrais un des meilleurs championnat du monde, avec potentiellement beaucoup de temps de jeu. J'ai fait le choix de dire oui. Ce devait être en décembre 2014 et un peu plus de cinq ans plus tard, je suis encore là. (sourire) »
La première prise de bec avec Thierry Anti
« Ce ne sont pas des engueulades. Mais je ne comprenais pas au début, c'est vrai. Il m’a fallu comprendre Thierry et c’est toujours spécial avec lui, quand il s’énerve. Je pensais que c’était personnel et du coup je me mettais en situation d’opposition. Mais c’était à moi de comprendre la façon de fonctionner du coach et pas à lui de s’adapter à moi. Je n’avais pas eu à faire face à ça avant et ça me perturbait beaucoup et je n'étais pas à l'aise sur le terrain. C’est pour cela qu’à la trêve, je me suis remis en question. Je me suis dit que c’était à moi de faire les changements, les efforts. Il y avait aussi à gérer l’adaptation à une nouvelle langue, une nouvelle ville, une nouvelle équipe. Je me suis fait violence pour ne pas que la situation empire. Et j’ai pas mal changé. Tout ça m’a permis de grandir, de prendre de la confiance. »
Ma première sélection
« Ce n’était pas pour un match amical ou un stage, c’est directement pour jouer le Mondial 2017. (rires) Je n’y croyais pas du tout, ce n’est pas quelque-chose auquel je pensais. J’ai reçu un appel en décembre 2016 pour me dire que je participerai au Mondial. Il y a eu pas mal de répercussions médiatiques puisque je prenais la place d’Albert Rocas. J’étais en duo avec Victor Tomas, qui m’a beaucoup aidé à vivre ce genre d’évènement. Au final, ce fut un championnat inoubliable. Au niveau personnel, j’ai très bien joué et j’ai beaucoup apporté à l'équipe. On a perdu en quarts de finale face à la Croatie, c’était une déception bien sûr, mais de mon côté j’avais vraiment réussi mon Mondial. C’est un peu à ce moment-là que les gens ont commencé à me connaître je pense. Avant cela, on ne me connaissait pas trop, et ça m’a d’ailleurs sans doute servi face à certains adversaires. Mais j’en ai profité pour prendre pas mal de confiance et pour m’installer un peu. (sourire) »
Ma première élection comme meilleur ailier droit de Lidl Starligue
« A la fin de la saison 2016/2017. J’avais donc fait une première saison un peu compliquée, mais celle-ci fut vraiment géniale. Il y a eu l’arrivée de Gurbi (Eduardo Gurbindo, ndlr), avec qui je m’entends très bien, qui m’a vraiment aidé. Il m’a beaucoup aidé, notamment en me faisait des passes. Et puis Valero est parti donc je tirais les penaltys. Je me sentais plus important dans l’équipe en fait. Et à un niveau plus collectif, c’était une saison vraiment extraordinaire puisqu’on s’est qualifié pour la Ligue des champions en terminant deuxième derrière Paris, on a gagné la Coupe de France… J’ai bien profité des vacances, même si j’avais envie de reprendre tout de suite car la dynamique était vraiment extraordinaire. »
Mon premier titre avec l'Espagne
« L’Euro 2018. Je ne savais si j’allais revenir en sélection, et finalement je suis appelé avec Ferran Sole. Et là j’ai ressenti vraiment la pression, car c’était la première fois qu’il n’y avait plus Victor Tomas, mais deux petits jeunes à la place. (sourire) Du coup, j’ai vraiment mal commencé le championnat, avec un très mauvais pourcentage aux tirs. J’étais vraiment en colère contre moi-même. J’ai dû attendre le 4e ou le 5e match pour me débloquer et enfin me sentir bien. La suite, on la connaît, avec cette demi-finale contre la France. C’était spécial, on s’est croisé à l’hôtel, il y avait pas mal de potes. Je n’avais pas encore conscience de la magnitude du match du lendemain, c’était une place en finale de l’Euro qu’on jouait... Mais au final, on a su écarter tout ça et ça s’est bien passé je crois. (sourire) »
Ma première à Cologne
« Si on m’avait dit en début de saison que j’allais être champion d’Europe avec l’Espagne, et que j’allait jouer le Final4 de la Ligue des champions avec le « H », je ne l’aurais sans doute pas cru. (rires) C’était un truc de dingue. On y allait match après match, mais quand on a vu que Veszprem avait chuté face à Skjern en huitièmes et qu’on jouait les Danois en quarts, on s’est dit qu’il y avait peut-être quelque-chose à faire. Et puis ce fut la folie... J’ai revu les matches du Final4, il n’y a pas longtemps et c’est vraiment inoubliable. La taille de l’évènement, l’ambiance… Le match contre Paris, en demi-finales, c’était incroyable. Ca reste un très bon souvenir, même si je dois avouer que le mois qui a suivi notre défaite en finale (contre Montpellier, ndlr) a été très très compliqué pour moi. Ca fait très très mal au coeur, à la tête… J’étais vraiment triste tous les jours. Maintenant, avec un peu de recul, cette participation commence à prendre de l’importance. Comment le « H » s’est retrouvé là pour sa deuxième participation ? En plus il y avait trois équipes françaises, c’était historique. Maintenant j’espère quand même y retourner dans les années à venir… (sourire) »
Ma première grosse blessure
« Et bien c’est là, en novembre dernier. C’était avec l’équipe d’Espagne, et ce devait être une mini déchirure au mollet, et finalement ça a pris trois mois et demi. Ce n’était pas agréable car au début on m’a dit deux semaines, et finalement c’était plus. C’était compliqué à gérer pour moi car je n’avais jamais connu ça avant. Je n’étais pas habitué à identifier la douleur, à vivre avec ça. Et puis ce n’était pas facile pour moi de regarder les matches à la TV ou derrière le banc. J’ai aussi raté l’Euro avec l’Espagne. Et si mon corps a plutôt bien réagi, c’était plus compliqué au niveau de la tête. Mais j’ai fait ce qu’il fallait, et je suis bien revenu juste avant cet arrêt de la saison… »
Benoît Conta